Surréalisme

Mouvement littéraire et artistique du XXe Siècle

Le Mouvement surréaliste

La Première Guerre mondiale a exposé la fragilité de l'humanisme occidental, culminant en une catastrophe historique majeure. Les valeurs traditionnelles ne résistaient plus à la réalité, nécessitant une redéfinition de l'homme et du monde.

Dada a réagi de manière radicale en cherchant à détruire, tandis que le surréalisme a poursuivi cette quête en tentant de provoquer une renaissance, influencée par les révolutions intellectuelles et politiques de l'époque, notamment le freudisme et le marxisme, tout en intégrant des disciplines comme l'ésotérisme.

Les barrières entre différentes voies de connaissance ont été abolies. Tous les moyens furent envisagés pour réviser en profondeur l'homme malade de la civilisation de ce début du XXe siècle.

Surréalisme

Une nouvelle perspective

Jusqu'alors, l'art ou la religion servaient de refuge face à une réalité en déclin. Le surréalisme a nié l'écart entre réalité et irréel, entre possible et impossible. Pour la première fois, la volonté de réaliser le rêve dans la vie quotidienne a émergé, non pas comme un but littéraire, mais comme une raison de vivre.

Le surréalisme a été préparé de longue date par des marginaux de chaque époque, tels que le marquis de Sade, et a culminé avec les romantiques allemands comme Novalis, Hölderlin et surtout Achim von Arnim, ainsi que les « petits romantiques » français et des figures comme Rimbaud et Lautréamont.

Les Précurseurs

Bien avant la Première Guerre mondiale, l'art reflétait déjà le malaise civilisationnel avec des mouvements comme le futurisme et le cubisme. Pendant la guerre, des revues comme Nord-Sud et Sic, sous l'inspiration de Guillaume Apollinaire, ont réuni des artistes remettant en cause non seulement les formes artistiques mais aussi la réalité elle-même.

C'est chez Apollinaire qu'André Breton, Philippe Soupault et Louis Aragon se rencontrèrent. Ils fondèrent ensemble la revue Littérature en mars 1919, marquant ainsi le début de leurs explorations surréalistes.

Les débuts du surréalisme

Les premiers essais d'écriture automatique, fruits de la collaboration entre Breton et Soupault, parurent en 1920 sous le titre Les Champs magnétiques. À partir de 1921, les surréalistes s'adonnèrent au sommeil hypnotique, une pratique marquante de leur démarche créative.

En 1924, Breton publia le Manifeste du surréalisme, définissant ce nouvel art de vivre. Cette même année, le mouvement surréaliste fut officiellement fondé, rassemblant des artistes comme Man Ray, Francis Picabia, Max Ernst et d'autres.

Les activités surréalistes

Les surréalistes menaient des activités variées : écriture automatique, jeux comme le cadavre exquis, rêves éveillés, sommeils hypnotiques. Leur but n'était pas de créer de l'art mais de révéler la vie telle qu'elle est, en brisant les préjugés et tabous culturels.

  • Création de la revue La Révolution surréaliste en 1924
  • Publication de pamphlets et tracts pour attaquer la société bourgeoise
  • Exploration des rêves dans la vie quotidienne, notamment dans les rues de Paris

L'engagement politique

Face aux limites de leur attitude face à la société, les surréalistes se tournèrent vers l'engagement politique, prenant position contre des injustices comme la répression au Maroc. Ils adoptèrent des points de vue communistes, sans toutefois perdre leur indépendance.

Leurs œuvres, telles que Le Paysan de Paris d'Aragon et Nadja de Breton, témoignent de cette période de réflexion et de création intense.

Les grands initiateurs et modèles du surréalisme

Les pionniers majeurs

L'émergence du surréalisme doit beaucoup à trois figures clés : Picasso, De Chirico et Marcel Duchamp. Picasso, notamment, a révolutionné l'art pictural cubiste, ouvrant la voie à des mouvements comme le surréalisme et l'abstraction. Son influence sur des artistes tels que Chagall et De Chirico lui-même a été remarquable, incarnant le prototype du peintre surréaliste. Max Ernst, Magritte, Dalí, Tanguy et Brauner comptent parmi ceux qu'il a inspirés.

De Chirico, quant à lui, a capturé une profonde angoisse à travers des scènes apparemment ordinaires, grâce à son engagement total envers l'automatisme de la vision, conférant à ses œuvres une résonance unique. À l'inverse, l'influence de Duchamp sur le surréalisme est plus mythique que concrète, centrée autour de pièces célèbres telles que le « Grand Verre », devenu emblématique à partir de 1934. Sa critique de l'art a remis en question ses limites et a implicitement suggéré de les transcender.

Les grands modèles

Contrairement aux initiateurs, les grands modèles du surréalisme dans les arts plastiques sont souvent anonymes. Parmi eux, le « sauvage », représenté par les sculpteurs océaniens de Nouvelle-Guinée et de Nouvelle-Irlande, a fasciné les surréalistes avec leur mythologie authentique et leur invention métaphorique. L'artiste schizophrène semble trouver son inspiration de manière autonome, souvent dans un contexte marginal, parallèlement à la démarche du « sauvage ».

Enfin, l'artiste médiumnique, qui abandonne l'automatisme pour communiquer avec les « désincarnés », génère une créativité assurée, se manifestant à travers des courbes délirantes ou une rigoureuse ordonnance de lignes. L'automatisme, technique principale de la peinture surréaliste, vise à retrouver cet « état de grâce » du sauvage, du schizophrène ou du médium, explorant non seulement l'esthétique mais aussi l'ascétisme.

Les grandes phases du surréalisme

Les débuts du mouvement surréaliste (1919-1928)

En 1919, alors que De Chirico s'enfonce dans l'académisme, Max Ernst bouleverse les conventions avec ses premiers collages, le plaçant en tant que premier peintre surréaliste. À son arrivée à Paris en 1922, il dresse le portrait du groupe naissant avec « Au rendez-vous des amis ». Man Ray, principalement absorbé par la photographie à l'époque, contribue avec ses expérimentations de rayogrammes et de rayographies. La fin de 1923 et le début de 1924 voient l'adhésion d'André Masson et Joan Miró, introduisant respectivement le dessin et la peinture comme premières applications plastiques de l'automatisme.

L'année 1925 est cruciale : en réponse aux doutes exprimés par Pierre Naville sur la peinture surréaliste, Breton lance « Surréalisme et la peinture » dans la Révolution surréaliste, introduisant le concept de « modèle intérieur ». Arp rejoint également le mouvement, Ernst expérimente les « frottages » et la première exposition surréaliste voit le jour, réunissant Arp, De Chirico, Ernst, Klee, Masson, Miró, Picasso, Man Ray et Pierre Roy. En 1925, Picasso peint « La Danse », marquant son évolution du cubisme vers le surréalisme. Tanguy et Magritte commencent également à explorer la peinture surréaliste cette année-là. Magritte s'installe à Paris en 1927 et participe aux activités collectives, contribuant à l'émergence des peintres surréalistes les plus célèbres de cette période, malgré les résistances des marchands et des critiques.

L'internationalisation du surréalisme (1929-1939)

La seconde phase du surréalisme commence avec l'arrivée de Dalí et Giacometti comme nouveaux membres éminents. En 1929, Dalí présente sa première exposition préfacée par Breton, introduisant sa « méthode paranoïaque-critique » en opposition à l'automatisme. La même année, Giacometti commence à produire des œuvres uniques sous l'influence de son inconscient, créant des sculptures oniriques distinctes. Arp explore également des formes simples mais étonnamment sensuelles. À partir de 1931, l'objet surréaliste devient un sujet de fascination pour de nombreux artistes, anciens et nouveaux. Entre 1932 et 1935, de nouveaux talents comme Hans Bellmer, Victor Brauner, Oscar Domínguez, Richard Oelze, Meret Oppenheim, Wolfgang Paalen et Kurt Seligmann émergent à Paris.

À partir de 1935, le surréalisme se diffuse à l'international avec des expositions au Danemark, aux Canaries, en Tchécoslovaquie, à Londres, à New York, au Japon, et culmine à Paris en 1938 avec une exposition réunissant soixante-dix artistes de quatorze pays différents. La période 1938-1939 voit l'avènement de l'« automatisme absolu », encouragé par les « décalcomanies » de Domínguez en 1936 et les « fumages » de Paalen en 1937. Des artistes comme Matta, Gordon Onslow-Ford et Esteban Francès incarnent cette nouvelle direction, bien que Masson, réintégré au groupe après son départ en 1929, et Dalí, avec ses tendances de plus en plus réactionnaires, rompent avec les surréalistes.

Le surréalisme pendant la guerre (1940-1946)

La Seconde Guerre mondiale contraint les surréalistes à se disperser. En dehors de Picasso, qui reste en France, seuls Brauner, Domínguez et Jacques Herold continuent de créer activement. Ernst, Francès, Masson, Matta, Onslow-Ford, Man Ray, Seligmann et Tanguy trouvent refuge aux États-Unis, tandis que Leonora Carrington, Paalen et Remedios Varo s'exilent au Mexique. Miró retourne en Catalogne.

L'exil en Amérique du Nord et du Sud marque l'apogée du surréalisme, avec des contributions significatives de Masson, influencé par les mythes amérindiens dans ses œuvres les plus lyriques, Ernst qui explore la technique de la « décalcomanie » pour créer des paysages oniriques, Matta avec ses visions cosmiques grandioses, et Tanguy, le seul surréaliste à s'installer durablement aux États-Unis. Wifredo Lam, imprégné du vaudou après sa rencontre avec les surréalistes à Marseille en 1940, développe une œuvre flamboyante. Aux États-Unis, la présence des surréalistes catalyse les artistes américains vers l'automatisme comme voie d'émancipation, avec des figures comme Arshile Gorky, qui atteint une profondeur émotionnelle sans précédent malgré son suicide tragique en 1948.

Le surréalisme après la guerre (1947-1969)

L'Exposition internationale du surréalisme de 1947 à Paris marque une renaissance post-guerre. L'automatisme devient dominant, avec des incursions occasionnelles vers l'abstraction lyrique, représentées par des artistes tels que Francis Bott, Jean-Paul Riopelle, Iaroslav Serpan, Simon Hantaï et Antonio Saura. Installée à Paris depuis 1947, Toyen se distingue comme une peintre d'hallucinations par excellence. Les premiers artistes surréalistes, maintenant reconnus internationalement, s'éloignent progressivement de la collaboration collective, marquant des ruptures avec les départs de Matta et Brauner en 1948, de Herold en 1951, et d'Ernst en 1954.

Cependant, de nouvelles adhésions continuent presque sans interruption, avec des artistes tels qu'Adrien Dax en 1949, Hantaï et Max Walter Svanberg en 1953, Agustín Cárdenas et Pierre Molinier en 1956, Le Maréchal en 1957, Robert Lagarde en 1958, Jean Benoît, Yves Laloy, Mimi Parent et Friedrich Schröder-Sonnenstern en 1959, Jean-Claude Silbermann en 1961, Jorge Camacho en 1962, et Gabriel Der Kevorkian en 1963. À partir de 1955, sous l'influence du critique Charles Estienne, un mouvement vers le tachisme commence à se dessiner, parfois s'entrelaçant avec des formes abstraites lyriques telles que celles de Degottex, Duvillier, Loubchansky et Messagier. À partir de 1960, une alliance tactique avec le groupe « Phases », animé par Édouard Jaguer, permet à des artistes tels que Pierre Alechinsky, Enrico Baj, Alberto Gironella, Konrad Klapheck et Hervé Télémaque d'échanger avec les surréalistes.

Deux grandes expositions internationales du surréalisme sont organisées de son vivant à Paris : « Eros » en 1959 et « l’Écart absolu » en 1965, marquant l'engagement du mouvement dans le domaine de l'érotisme et face à la société de consommation. Après la mort d'André Breton en 1966, de nouveaux peintres surréalistes émergent, tels que Théo Gerber et Ivan Tovar. La découverte en 1969 de l'œuvre sur laquelle Duchamp a travaillé pendant vingt ans, « Étant donnés : 1o la chute d'eau, 2o le gaz d'éclairage », peut être interprétée comme la conclusion de l'ère surréaliste dans les arts plastiques, ou plutôt comme le signe d'une étape qui se termine, ouvrant la voie à une nouvelle ère.

Résumé

Le mouvement surréaliste a fortement été influencé par les mouvements dadaïstes et psychanalytiques, ainsi que par les écrits de Carl Gustav Jung et Sigmund Freud sur l'inconscient. Les surréalistes cherchaient à explorer les méandres de l'inconscient à travers l'interprétation des rêves et les visions oniriques et les fantasmes qui lui étaient associés. Les artistes surréalistes utilisaient souvent des méthodes de manipulation de l'inconscient telles que l'écriture automatique pour sublimer leurs oeuvres.

Les peintres surréalistes marquants :

Max Ernst : il a Exploré les profondeurs de la psychanalyse et de la mythologie à travers des œuvres captivantes qui plongent le spectateur dans les profondeurs de l'inconscient. Ses tableaux révèlent un monde énigmatique où les images se fondent et se transforment en permanence.

Yves Tanguy : il a insufflé une dose de vibrations inconscientes dans le monde de l'art, ses peintures déroutantes semblent en effet provenir d'un univers parallèle imaginaire. Ses toiles évoquent un monde étranger où les formes organiques se mêlent à des paysages irréels.

Leonora Carrington : Les rêves, les visions oniriques et les contes de fées prennent vie à travers les œuvres de Leonora Carrington. En puisant dans sa propre imagination incroyablement fertile, cette artiste s'inspire des mythes et des légendes, ses tableaux révèlent un univers fantasmagorique rempli de symboles puissants basés sur des récits mystérieux.

Salvador Dalí : Maître incontesté de l'onirisme, Dalí a transcendé les limites de la réalité avec ses peintures et sculptures surréalistes. Son style distinctif et sa vision unique ont donné naissance à des œuvres emblématiques telles que "La Persistence de la mémoire". Le maître s'est efforcé toute au long de sa carrière a défié les logiques conventionnelles en tentant de surprendre en permanence son public.

René Magritte : Maître de l'énigme picturale, Magritte a créé des univers mystérieux et intrigants. Ses tableaux défient les lois de la logique, juxtaposant des éléments familiers de façon inattendue afin d'évoquer chez le spectateur un sentiment de perplexité et de fascination face à la réalité apparente.

Joan Miró : il a exploré les frontières de l'abstraction en donnant vie à des formes simplifiées hautes en couleurs. Ses compositions invitent le spectateur à découvrir la quintescence de ce que l'imagination et la créativité peuvent produire.

Frida Kahlo : Frida Kahlo, artiste mexicaine emblématique, elle a utilisé l'art comme une façon d'exprimer sa vie personnelle tumultueuse. Ses autoportraits introspectifs révèlent une profondeur émotionnelle et une réflexion très personnelle sur l'identité. Ses tableaux sont imprégnés de symboles et d'éléments surréalistes, offrant ainsi un instantané captivant de son monde intérieur.

Pablo Picasso : peintre espagnol révolutionnaire, ce génie de la peinture a transcendé les mouvements artistiques de par son talent polyvalent et sa vision novatrice. Du surréalisme au cubisme, en passant par d'autres courant, Picasso a repoussé les limites de la création artistique.

René Clair : En tant que réalisateur français, René Clair a apporté une dimension surréaliste au cinéma à traves sa filmographie. Ses œuvres, telles que "Entr'acte" et "La Beauté du diable" ont été influencées par le mouvement surréaliste.

Marcel Duchamp : cet artiste français visionnaire a défié les conventions artistiques traditionnelles. Il est étroitement associé au surréalisme et au dadaïsme. Ses œuvres iconiques telles que "Fountain" a profondément bouleversé le paysage artistique. Marcel Duchamp était incontestablement un esprit subversif qui a su provoquer chez ses contemporains une réflexion profonde sur la nature de l'art lui-même.

Le surréalisme ne se limite pas à un sous-genre unique en peinture, il embrasse une grande variété d'approches : le surréalisme psychanalytique, le surréalisme abstrait, le surréalisme figuratif et le surréalisme magique.

Le surréalisme psychanalytique s'appuie sur les concepts de la psychanalyse freudienne tandis que le surréalisme abstrait se concentre sur les formes et les couleurs pour représenter les états de l'inconscient.

Le surréalisme figuratif se fonde sur des images concrètes et des objets afin de représenter les états de l'inconscient, le surréalisme magique quant à lui utilise des symboles et des motifs mystiques pour explorer les zones cachées de la conscience.

Des sites web pour en savoir plus sur le surréalisme en peinture :

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