Le Fauvisme : le rugissement des couleurs

Le fauvisme, ce mouvement audacieux et éphémère de la peinture française du début du XXe siècle, tire son nom d'une remarque acerbe de Louis Vauxcelles, critique d’art. Lors du Salon d’automne de 1905, dans une salle où les œuvres de Maurice de Vlaminck et Henri Matisse côtoyaient un délicat buste en marbre d’Albert Marque, Vauxcelles s’exclama : « Donatello dans la cage aux fauves ! »

Fauvisme

Cette formule, relayée par la presse consacra une appellation qui allait devenir légendaire. Les artistes exposés, unis par leur audace chromatique furent ainsi désignés comme des « fauves », et leur salle, comme une « cage centrale ».

Maurice de Vlaminck : L’instinct au service de la peinture

Peintre autodidacte, Vlaminck débuta modestement en peignant les paysages bucoliques de Chatou, utilisant des couleurs franches et non diluées directement sorties du tube. Ce choix audacieux traduisait une spontanéité presque enfantine, où le rouge vif d’un toit côtoyait le vert pur des feuillages sous le bleu éclatant du ciel.

Sa rencontre avec Van Gogh, à travers une exposition à la galerie Bernheim-Jeune en 1901, fut une révélation : « Tout ce que je rêvais de faire, je le vis là, sur les murs. J’en fus bouleversé. »

Les principaux traits du fauvisme

  • Rejet des conventions académiques.
  • Peinture instinctive et libérée des codes.
  • Refus des dogmes académiques comme chaînes de l’expression artistique.

Henri Matisse : La sensibilité du trait

Plus âgé que ses camarades, Matisse apporta une profondeur réflexive au fauvisme. Élève de Gustave Moreau, il avait assimilé les enseignements de son maître, notamment autour de cette idée fondamentale : « La vérité réside dans le sentiment intérieur, non dans ce que perçoit l’œil. »

Pour Matisse, la couleur n’était pas simplement un outil descriptif, mais un langage à part entière, capable de traduire des émotions indépendamment du sujet représenté. Il déclarait : « Les lignes, la composition, les tonalités : tout cela parle, bien au-delà du titre d’une œuvre. »

En cela, il frôla l’art abstrait sans jamais s’y abandonner complètement, privilégiant une quête d’équilibre et de sérénité : « Mon rêve ? Un art qui apaise, sans tourment ni angoisse. »

Le Salon d’automne de 1905 fut le théâtre d’une controverse virulente. Les toiles de Matisse, Vlaminck, Derain, Marquet, et d’autres provoquèrent moqueries et indignation. Mais ce tumulte scella la naissance d’un mouvement. Loin d’une école structurée, le fauvisme prônait l’indépendance absolue de l’artiste face à toute forme de dogmatisme, qu’il soit académique ou réaliste.

Cependant, cette ferveur collective ne pouvait durer. Comme l’écrivit Othon Friesz : « Nous avons créé le fauvisme, mais nous avons été les premiers à l’immoler. »

Dès 1908, les artistes, chacun suivant sa propre voie, s’éloignèrent de cette révolution chromatique. Mais l’héritage du fauvisme demeura :

  • Libération de la peinture des conventions académiques.
  • La couleur comme souveraine expression de l’âme de l’artiste.
  • Une influence durable sur l’art moderne.

Fauves et apparentés

Charles Camoin

Charles Camoin (Marseille 1879 - Paris 1965) a été formé à l'École nationale supérieure des beaux-arts sous la tutelle de Gustave Moreau, partageant cette période avec Matisse, Marquet et Manguin. Son séjour à Aix-en-Provence pour le service militaire lui permit de rencontrer Paul Cézanne qui l'a influencé profondément. Les correspondances entre Cézanne et Camoin, publiées par la suite, témoignent de leur relation artistique. Sous l'influence marquée d'Auguste Renoir, Camoin a capturé de nombreux paysages de la Côte d’Azur ainsi que des portraits et des natures mortes.

Auguste Chabaud

Auguste Chabaud (Nîmes 1882 - Graveson, Bouches-du-Rhône, 1955) a débuté à l’école des beaux-arts d'Avignon avant de poursuivre sa formation à Paris à l'académie Julian et à l’École nationale supérieure des beaux-arts. Entre 1902 et 1912, il a exploré les scènes nocturnes parisiennes avec une approche énergique, mêlant contrastes et résumés expressifs. À son retour dans sa région natale en 1923, son style artistique a évolué vers des thèmes rustiques, tout en conservant une vigueur remarquable dans la composition et le dessin, et en modérant les palettes de couleurs utilisées.

Othon Friesz

Othon Friesz (Le Havre 1879 - Paris 1949), élève de Charles Lhullier et admirateur de Jongkind, a étudié à l’école des beaux-arts du Havre aux côtés de Raoul Dufy et Georges Braque. Boursier à l’École nationale supérieure des beaux-arts, il participa activement aux débats sur l’expression de la couleur pure dès 1898. Il a exposé ses œuvres au Salon des artistes indépendants en 1903, avant de rejoindre la "cage aux fauves" lors du Salon d’automne de 1905. Friesz a développé une interprétation personnelle de la lumière picturale, mettant en avant la vérité et la combinaison ordonnée des couleurs comme éléments essentiels de son art.

Henri Manguin

Henri Manguin (Paris 1874 - Saint-Tropez 1949), élève de Gustave Moreau, a été exposé à la célèbre "cage centrale" du Salon d’automne de 1905 aux côtés de Matisse. Fidèle au mouvement fauviste, Manguin a abordé la forme avec une interprétation mesurée, caractérisant ses œuvres par un coloris vif qui reflète une joie de vivre sereine. À partir de 1920, il a principalement résidé et travaillé à Saint-Tropez, Cassis et Sanary-sur-Mer.

Jean Puy

Jean Puy (Roanne 1876 - 1960), après des études en architecture à Lyon, s’est formé à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris et à l'académie Carrière. Il a exposé au Salon d’automne de 1905 aux côtés de Matisse et Derain. Modéré dans son adoption de la couleur pure, son œuvre a souvent été comparée à celle de Bonnard et Vuillard en raison de son caractère intimiste et de ses choix artistiques.

René Seyssaud

René Seyssaud (Marseille 1867 - Sains-Chamas 1952) a présenté ses œuvres au Salon des artistes indépendants en 1892, utilisant exclusivement des couleurs pures avant Vlaminck et Matisse. Formé aux écoles des beaux-arts de Marseille et d’Avignon, il a développé un style fauve marqué par un coloris énergique et une facture réaliste. Ses peintures capturent des paysages, des scènes de la vie paysanne et des portraits pittoresques, reflétant une conception personnelle et audacieuse de l'art.

Louis Valtat

Louis Valtat (Dieppe 1869 - Paris 1952), élève de Gustave Moreau dès 1887, a débuté dans l’impressionnisme avant de s'orienter vers la couleur pure. Précurseur dans cette voie, il a maîtrisé cette technique avant même le Salon d’automne de 1905. Paysagiste passionné par les roches rouges de l’Esterel, il a résidé à Anthéor à partir de 1899. Ses œuvres, allant des scènes de la vie parisienne aux natures mortes, se distinguent par la vigueur de son coloris, accentuée par des contours sombres et marqués.

Kees Van Dongen

Kees Van Dongen (Delfshaven, près de Rotterdam 1877 - Monte-Carlo 1968), naturalisé français, a débuté à New York comme dessinateur sous l’influence de Toulouse-Lautrec et Steinlen. Établi à Paris, il a adopté la couleur pure après le scandale de la "cage aux fauves" en 1905. Peintre chroniqueur de la vie parisienne, il est célèbre pour ses portraits incisifs et sophistiqués, ainsi que ses nus et natures mortes captivants.

Ce qu'il faut retenir

Le fauvisme est un mouvement artistique né en France à la fin du 19ème siècle. Il se caractérise par l'utilisation de couleurs vives et éclatantes, en contraste souvent avec des formes simplifiées et particulièrement stylisées. Le fauvisme fut influencé par les styles post-impressionnistes, tels que les Nabis et les Fauves, ainsi que par les travaux d'artistes tels que Paul Gauguin et Henri Matisse.

Autres peintres célèbres associés au fauvisme :

André Derain (1880-1954) : peintre français qui a participé l'émergence du fauvisme. Ses peintures à l'huile vives et colorées témoignent de son amour pour les formes généreuses incarnant l'essence de la nature.

Raoul Dufy (1877-1953) : peintre français qui s'est inspiré du fauvisme pour créer des scènes urbaines et des paysages marins, mais également des nus, des portraits et des illustrations de livres.

Georges Rouault (1871-1958) : peintre, graveur et illustrateur français influencé par les thèmes religieux, sociaux et politiques.

Le fauvisme a eu une influence majeure sur l'utilisation de la couleur dans l'art, ainsi que pour sa rupture avec les conventions traditionnelles de la peinture.

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